RechercAccueil - Contact
Chercher sur Liberterre
GaiaSophia Agriculture
Métahistoire Enthéogènes

Metahistoire

Mythos de Gaïa-Sophia

•> Introduction aux essais subséquents à la Correction de Sophia.

•> Gaïa et la Gnose 01: le biomysticisme et le futur de l'humanité

•> Courtiser la Putain de Sagesse

•> La Mystique de la déesse

•> La Déesse Déchue

•> Avant l'Origine de la Terre

•> Le Mythos de Gaïa: un panorama

•> Le Mythos de Gaïa: les sources

•> Le Mythos de Gaïa: Partage

•> Le Mythos de Gaïa: Commentaires

•> Coco de Mer 01

•> Coco de Mer 02

•> La Promesse d’une Planète Solitaire. 01

•> La Promesse d’une Planète Solitaire. 02

•> La Promesse d’une Planète Solitaire. 03

•> L’Arbre et la Source

•> La passion de Sophia

•> Les Ages de Gaïa

•> Synopsis: la Chute de la Déesse Sagesse

ActualiTerres ReporTerres
LiberTerres Gaïagnostic
LivreTerres Boutique


Chapitre 11 de "Pas en Son Image"

La Déesse Déchue

John Lash

Traduction de Dominique Guillet.

Les initiés, dans les cultes de la Grande Mère, passaient au travers d'une expérience sublime d'instruction, qui leur révélait, dans un état de conscience non ordinaire, les origines cosmiques de la vie sur Terre. Ils retournaient ensuite vers la vie ordinaire afin d'enseigner ce qu'ils avaient appris. Comme nous l'avons souligné au premier chapitre, G. R. S. Mead, un des premiers érudits et traducteurs d'avant la découverte des Codex de Nag Hammadi, écrivit que les initiés “avaient introduit tous les arts de la civilisation... ils étaient les instructeurs des sociétés naissantes. Ils enseignaient les arts, la nature des divinités, les mondes occultes, la cosmologie, l'anthropologie, etc.” En bref, c'étaient les éducateurs de l'ancien monde, les conseillers et les doyens des études classiques.

Langage Sacré

Le réseau des Ecoles de Mystères était le système universitaire de l'antiquité. Le collège Egyptien, dans lequel Hypatia enseignait, appartenait à ce que l'on pourrait considérer aujourd'hui comme un groupe de grandes universités. Memphis correspondait à Yale et Luxor correspondait à Harvard. Il en était de même pour les écoles Levantines de la Palestine, de la Syrie et de la Turquie, dans lesquelles la plupart des Gnostiques connus enseignaient. Au nord du bassin Méditerranéen, vers l'Europe, la Grèce constituait le territoire principal des collèges annexes. Dans son ouvrage Black Athena, Martin Bernal cite une ancienne légende selon laquelle les Mystères d'Eleusis furent fondés par une mission en provenance de l'Egypte. Il semblerait que le culte du dieu des grains Osiris se transforma en culte de Demeter - mais une telle interprétation n'est pas totalement juste dans la mesure où les Mystères ne se propagèrent pas seulement par le biais d'une dissémination géographique. Dans toutes les régions de leur émergence, les rites initiatiques, tout comme les groupes d'enseignants, assumèrent un caractère régional qui reflétait la constitution physique et psychologique de ses habitants. C'est une caractéristique typique du biorégionalisme de l'Europe indigène qui survit encore de nos jours dans la riche diversité des cultures locales au travers du continent Européen.

Au fur et à mesure que le réseau des Mystères s'étendait en Europe, sa nature changea quelque peu car les traditions initiatiques de l'Ibérie et des Iles Britanniques étaient moins influencées par les facteurs Asiatiques, en particulier le concept Perse de dualité émanant d'une seule source que nous avons évoqué précédemment en relation avec le complexe du rédempteur Palestinien. Dans les cellules de la Syrie et du Levant, plus particulièrement, les telestai étaient profondément versés dans les problèmes délicats de la dualité Zoroastrienne et de la théocratie, l'instrument politique du patriarcat. Ces problématiques étaient au coeur de la vie des initiés dans les bastions, et les territoires d'origine, de la société théocratique, à savoir le Proche Orient. A bien d'autres égards, les caractéristiques essentielles de la connaissance initiatique étaient uniformes dans tout le réseau. Le doyen des collèges Druidiques des îles des Hébrides était tout à fait capable de converser avec des Telestai des écoles du Levant et de l'Egypte par le biais des langages primordiaux de l'astronomie et de la géométrie. Comme nous l'avons souligné précédemment, il existait un groupe d'études dans Alexandrie, à l'époque d'Hypatia, qui se consacrait à la préservation des connaissances initiatiques des Mystères de l'Hybernie des régions les plus septentrionales de l'Europe. Les collèges Druidiques existaient dans de nombreuses régions en raison du rôle de gardienne qu'assuma la race Celtique dans toute l'Europe. Les Druides, ou Gnostiques Hyberniens, comme on pourrait les appeler, étaient réputés parler couramment plusieurs langues. La forme de Gaélique qui est parlée de nos jours en Ecosse, en Irlande et dans le Pays de Galles descend directement de la langue ancienne qui ne fut jamais écrite. Le langage Celtique n'a été transcrit en lettres que vers les années 1930 par des érudits qui souhaitaient préserver les richesses de la culture orale de la poésie Gaélique.

Le Grec, tel qu'il est écrit de nos jours, est proche de la langue parlée au temps de Socrate mais une des différences essentielles entre le Grec et le Gaélique consiste dans le fait qu'il ait été écrit depuis environ 900 avant EC, c'est à dire depuis près de trois mille ans. Dans son ouvrage la Déesse Blanche, Robert Graves suggéra que l'écriture séculaire fut introduite en Europe par des “initiés free-lance” connus sous des noms tels que Cadmos, Gwydion, Ogma au visage de Soleil et Héraclès. A partir d'environ 600 avant EC, les doyens des Mystères initièrent ensemble des dynamiques très fertiles qui engendrèrent une somme énorme d'oeuvres écrites. L'alphabet Grec fut adapté par Cadmos, le Frère de l'Europe, à partir de l'écriture Phénicienne introduite, probablement, autour de 1250 avant EC. Durant les millénaires précédant cette époque, les doyens des Mystères avaient eu recours à des codes symboliques et à des langages secrets telles que les runes Druidiques et Nordiques, les oghams des bardes Gallois et le célèbre alphabet oghamique des Celtes décrit par Robert Graves qui en démontre la cohérence, lettre par lettre, avec la structure de l'Hébreu ancien. Curieusement, le code en base 22 de la plupart des antiques alphabets se retrouve dans l'Hébreu, le langage sacré de la Torah et on peut également en percevoir la permutation symbolique dans le Tarot, un jeu d'images symboliques utilisées pour la divination et le conseil psychologique. C'étaient des outils spécifiques aux éducateurs des Ecoles des Mystères.

On a beaucoup évoqué le fait que la base en 64 unités du code de l'ADN se retrouve dans le Yi Ching, un ancien ouvrage Chinois de divination, mais les systèmes en base de 20/22, tel que l'alphabet oghamique Celtique, peuvent tout autant suggérer que les anciens possédaient une connaissance directe de la structure de la vie, jusqu'au niveau moléculaire. Dans le Serpent Cosmique, l'anthropologue Jérémy Narby montre que les shamans ayahuasqueros Péruviens revendiquent un accès direct aux processus de la biologie moléculaire, une affirmation corroborée par leur connaissance intime de la pharmacologie qui, sous certains aspects, dépasse celle de techniciens modernes travaillant dans des laboratoires sophistiqués. L'instruction par la Lumière des Mystères offrait aux initiés Païens une connaissance similaire. Les plantes médicinales et les thérapeutiques, dont les techniques de guérison par les rêves, faisaient fondamentalement partie du curriculum des Ecoles des Mystères. Des noms tels qu'Esculape et Hygée ne sont pas tant des noms de personnages historiques que des titres honorifiques conférés aux maîtresses et aux maîtres des collèges initiatiques.

La perception infrasensorielle au niveau moléculaire était commune chez les siddhas, des yogis accomplis de l'Asie. Patanjali appelle la faculté de percevoir au niveau microscopique anima, la “vision microcosmique”. Dans son ouvrage sur les Yogas Sutras de Patanjali, Mircea Eliade met en valeur la nature empirique de la formation yoguique: “en réalisant le samadhi [une concentration parfaite et sans faille] en relation avec un objet spécifique ou une classe entière d'objets, le yogi acquiert certains pouvoirs occultes [siddhis] vis à vis de l'objet ou des objets impliqués dans son expérimentation”. Sir John Woodruffe affirma que, jusque vers 1900, les yogis de l'Inde possédaient une connaissance complète et exacte de l'anatomie humaine jusqu'aux plus petits détails de la structure nerveuse, dépassant celle de médecins patentés Occidentaux. Le terme Sanscrit siddha, “personne accomplie” est l'équivalent exact d'adepte, qui est issu du terme Grec adipisci, “accompli”, “achevé”, comme nous l'avons déjà souligné. Les Gnostiques, et leurs homonymes Européens, les initiés des Mystères, étaient des siddhas qui possédaient un éventail de facultés occultes, acquises par la pratique, qui leur permettaient de réaliser des observations directes des processus les plus secrets de la biologie, de la physiologie et de la chimie.

La faculté qui gérait les Ecoles de Mystères possédait des facultés.

Richard Rudgley dans The Lost Civilizations of the Stone Age a montré que les systèmes d'écriture n'apparurent nulle part spontanément ou miraculeusement mais ils furent intentionnellement développés à partir de langages symboliques préexistants, c'est à dire à partir des systèmes d'écriture sacrée. Pour des raisons qui n'ont jamais été clairement élucidées - et c'est une histoire remarquable jamais contée - les initiés qui vivaient dans tout l'ancien monde, à l'aube du premier millénaire avant EC, commencèrent à introduire des systèmes d'écriture séculaire. Ils inventèrent littéralement l'alphabétisation. Ce faisant, ils assumèrent la mission sacrée d'enseigner l'écriture, la lecture, l'analyse de textes et la traduction. Ce fut une des responsabilités majeures des Ecoles de Mystères que d'impartir les facultés liées au langage.

L'étude de la vie de Plutarque, l'écrivain Grec, nous permet de commencer à imaginer à quel point ils ont accompli leur vocation. Plutarque était un initié qui avait la responsabilité de l'enceinte d'Eleusis. (Le nom de cet endroit est peut-être un composé de la racine Grecque “eu” pour santé et salubrité et du terme Levantin “el” pour divinité, ce qui donne le “lieu de salubrité divine”. Dans La Déesse Blanche, Robert Graves écrit qu'Eleusis signifiait “arrivée”). Durant sa vie (environ 46 EC - environ 120 EC) Plutarque fut témoin du crépuscule des Mystères, le sombre prélude des Ages des Ténèbres qui commencèrent avec le meurtre d'Hypatia. Ce fut un écrivain prolifique dont une partie seulement des oeuvres a survécu mais ce qui a survécu comprend des centaines de milliers de mots. Il nous légua la description la plus complète que nous ayons des Mystères du dieu des grains Osiris. Inépuisable quant à sa production littéraire qui comprend des biographies, des essais moraux, de la mythologie, des essais historiques, des commentaires ésotériques et un riche trésor d'anecdotes et de récits personnels, Plutarque est le parangon par excellence d'un doyen d'école des Mystères. Imaginez des centaines de Plutarques, hommes et femmes, oeuvrant dans les Iles Britanniques, en Ibérie, en Gaule, en Italie, en Grèce et dans les Iles Grecques, au Levant, en Egypte, en Libye et à Carthage, et vous aurez une idée de l'étendue de l'antique système collégial.

Si les origines préhistoriques du réseau d'écoles des Mystères étaient contemporaines des sites mégalithiques les plus anciens, comme cela semble être le cas, elles peuvent donc être datées, de façon conservatrice, à 6000 ans avant EC. Ainsi, durant le dernier dixième de leur durée avant l'Ere Commune, à savoir une période de 600 ans, les Mystères produisirent un corpus de littérature qui refléta leur long développement préliminaire. En l'an 400, lorsque Hypatia vivait et enseignait, elle pouvait s'inspirer de plus d'un millier d'années d'alphabétisation et d'apprentissage continus.

Consécration

L'initiation était un système volontaire qui ne plaçait aucune restriction sur les activités séculaires de ses participants si ce n'est qu'elle exigeait d'eux qu'ils fissent preuve d'une honnêteté sans faille dans toutes les actions qu'ils réalisaient dans le monde. (La malhonnêteté, la jalousie et l'homicide sans raison constituaient les trois facteurs d'exclusion des candidats à l'initiation). La finalité des initiés était clairement d'être au service du monde en guidant et en nourrissant le potentiel humain, une personne à la fois. Ils étaient appelés les telestai parce qu'ils se consacraient à une finalité suprême, à un propos ultime - un telos. Ce terme implique “ce qui est ultime” plutôt que la perfection comme il est communément traduit. Il est étroitement corrélé à la notion moderne d'orientation vers un but ou téléologie. En langage commun, telos pouvait faire référence à la mort de quelqu'un: “Il a rencontré sa fin, son telos”. La mort est le moment ultime de la vie. De par la rencontre directe avec la Lumière Organique, les initiés comprenaient que leur telos était une finalité transcendant la mort. Le poète Grec Pindar (environ 518-438 avant EC) témoigna de l'influence de l'initiation en ces mots: “Bienheureux celui qui ayant vu les préoccupations communes dans le monde inférieur, connaît à la fois la fin de la vie et son origine divine”. Les telestai réalisèrent également que tout ce qui est appris en profondeur, d'une manière qui soit en harmonie avec le potentiel de l'étudiant, survivra à ceux qui l'enseignent. Ils comprirent que le potentiel d'apprentissage de l'espèce humaine est immortel, enraciné dans le don immortel du Noos, l'intelligence divine, mais qu'il doit être guidé soigneusement. Ils croyaient non pas que nous sommes des étincelles divines piégées dans les ténèbres du monde matériel mais que chaque personne est porteuse de l'étincelle du génie indigène de l'humanité. Il existe plusieurs voies de compréhension de l'orientation morale et éducative des Mystères car telos possède plusieurs dimensions.

L'éducation et la guidance étaient intimement liés dans le curriculum des écoles des Mystères. Dans le sens ultime, les initiés avaient pour finalité de guider l'humanité à s'auto-guider. Ils enseignaient ce qu'on pourrait appeler l'auto-direction mais, paradoxalement, ils l'enseignaient d'une manière exceptionnellement altruiste. Le but de la méthode télestique n'était pas ce que nous appelons de nos jours le développement personnel mais bien plutôt la consécration. Le développement personnel peut être poursuivi pour son propre bénéfice, ou pour acquérir quelque chose que l'on désire; la consécration, quant à elle, doit être réalisée au travers d'un engagement altruiste vis à vis de quelque chose différent de soi-même. De façon littérale, consécration signifie “sacrer avec”. Dans ce terme le a s'est transformé en e, obscurcissant quelque peu sa racine Indo-Européenne sacr-, corrélée au Sanscrit Shakti, un nom de la Déesse. Afin de promouvoir une auto-direction dans le but de vivre une vie consacrée, les telestai introduisaient leurs étudiants-néophytes à un cadre narratif, une histoire qui puisse les guider. Chaque individu découvrait, au sein de cette histoire, sa vocation sacrée et devenait auto-dirigé, un esprit libre. L'essence du programme télestique conférait une compréhension profonde de ce que cela signifie d'être un agent de co-évolution consacré à Gaïa-Sophia.

De nos jours, nous sommes enclins à concevoir l'évolution en termes biologiques et nous pouvons donc bien imaginer que la co-évolution est, ou pourrait être, une façon pour l'humanité de participer avec sagesse et avec amour au réseau de vie englobant toutes les espèces et même de s'harmoniser avec l'esprit planétaire Gaïa. Cette perspective caractérise le telos des Mystères. Si nous faisons, en tant que membres du monde moderne, de la co-évolution notre aspiration personnelle, si nous la proposons comme une finalité sociale et si nous la promouvons comme l'aspiration la plus élevée de notre espèce, il ne nous faut pas oublier que cette intention magnifique fut déjà mise en oeuvre par des êtres humains qui nous précédèrent. Nous pouvons être sûrs que c'est réalisable parce que d'autres l'ont réalisé avant nous. Cela a été testé et expérimenté avec un immense succès.

Dans un certain sens, tous les peuples indigènes de la planète ont mis en oeuvre cette intention et ont vécu en harmonie avec cette magnifique perspective transcendante. Cependant, plus spécifiquement et d'une façon artistique et épanouie, ceux qui participèrent aux Mystères de la Grande Mère en Europe, en Egypte et au Proche-Orient, réalisèrent la co-évolution à un niveau d'accomplissement que nous ne pouvons qu'esquisser. Si le poète Octavio Paz a raison et si le futur est une résurgence perpétuelle du passé dans le présent, il se peut que nous nous dirigions vers où les initiés étaient: vers un futur digne d'être vécu. S'étant consacrés à Gaïa, ils apprirent par le biais d'une communication directe avec l'intelligence planétaire. Dans leur rencontre avec la Lumière Divine, ils trouvèrent une histoire qui puisse guider l'espèce et ils la suivirent.

La perte de cette histoire explique en grande partie la dégénérescence morale et spirituelle de la société Occidentale, qui contamine maintenant le monde entier.

Biographie Planétaire

La narration à la base des Mystères était le mythos de Sophia, l'histoire du processus de métamorphose, en la planète terre, de la déesse Sophia, une divinité au niveau cosmique. Ce mythos était au coeur des Mystères dédiés à la Grande Mère, à la Magna Mater. Il explique non seulement l'origine de la vie humaine sur terre mais aussi l'origine de la vie et de la conscience de la terre elle-même. Dans sa description du mythe Hindou de la Mère du Monde, l'Indologiste Heinrich Zimmer écrivit:

“Le mythe ne peut pas réellement révéler la genèse de la grande déesse-mère mais seulement la façon dont elle apparaît car le mythe est conscient du fait qu'elle n'a pas de commencement, ce qui est implicite dans le terme 'mère': il sait qu'en tant que mère, elle préexista à tout ce à quoi elle a donné la vie”.

Cette affirmation souligne la nature unique de la cosmologie que l'on découvre dans le mythos de la Déesse Déchue. L'identification de la Terre avec une déité féminine ou une déesse est presqu'universelle dans la mythologie planétaire, et dans les traditions indigènes, mais seuls les récits Gnostiques présentent un scénario intégral décrivant comment une telle divinité, de niveau cosmique, se transforme en un corps planétaire. Zimmer dit que la Grande Mère “préexista à tout ce à quoi elle a donné la vie”. Si c'est le cas pour Sophia, comme les Gnostiques le pensaient et l'enseignaient, nous devons nous interroger quant à l'existence antérieure qui était la sienne.

De nos jours, nous appelons la Terre Gaïa car nous reconnaissons de plus en plus que la planète est vivante et intelligente, un supra-organisme conscient. Mais ce faisant, nous n'assumons normalement pas que l'entéléchie Gaïenne ait préexisté à la planète physique. Appeler la terre Gaïa est une “façon de parler” (en français dans le texte) mais se pourrait-il qu'il en soit plus que cela?

L'intuition émergente, chez de plus en plus d'être humains, que Gaïa est vivante et intelligente, qu'elle est “autopoétique”, à savoir qu'elle maîtrise son ordre propre, peut éveiller une intuition encore plus profonde: la présence autopoétique incarnée dans la Terre lui a préexisté. Sophia signifie “sagesse” et nous pouvons supposer que les adeptes des Mystères perçurent, dans le corps planétaire, la sagesse d'une présence divine, supra-terrestre, comparable à la sagesse qui anime le corps humain, mais infiniment plus vaste, plus complexe et plus puissante. Cela constitue, assurément, la prise de conscience écologique la plus fondamentale. Il se peut aussi que cela soit la prise de conscience religieuse la plus fondamentale.

Dans la cosmologie Gnostique, Sophia est le nom mythologique de Gaïa avant qu'elle ne devienne la Terre.

De nos jours, de par la reconnaissance émergente de Gaïa à notre avantage, nous avons le privilège d'observer que, tout comme James Lovelock l'observa, il ne fait de sens que de percevoir la Terre dans cette perspective. Avons nous réellement besoin de théories de systèmes généraux, de cybernétiques, de structures dissipatives et de formules tautologiques d'auto-organisation pour comprendre Gaïa? Ces schémas conceptuels ne seraient-ils pas là seulement pour dresser des distractions “masculines” à l'encontre de la communion avec la planète vivante? Chez les anciens Grecs, theoria était la contemplation pure et simple; malheureusement, de par la structure du mental moderne, nous sommes souvent inféodés à la théorie en soi qui nous ligote et nous aveugle au point que nous méprenions la carte pour le territoire.

Ce que nous recherchons dans la “théorie Gaïa”, c'est une dimension imaginale vivante et non pas un échafaudage de cogitations de systémique et de cybernétique. Fort heureusement , cette dimension imaginale est déjà disponible - nous en avons du moins les rudiments fertiles - dans le mythos de Sophia. L'histoire sacrée au coeur des Mystères de la Grande Mère possède une structure complexe qui peut être esquissée en neuf épisodes:

Premier épisode. Une singularité émerge au sein de la Divinité suprême, le royaume du Plérome (la plénitude divine - astronomiquement parlant le coeur galactique). La singularité est porteuse d'un potentiel d'une innovation à émerger dans l'univers. Elle est appelée l'Anthropos.

Deuxième épisode. Deux divinités (Eons) parmi la compagnie des dieux Pléromiques, Christos et Sophia, configurent la singularité pour la projeter dans la sphère des bras galactiques, là où émergent les systèmes planétaires.

Troisième épisode. La singularité encodée est émanée du Plérome vers le royaume du “chaos extérieur” afin qu'elle puisse progressivement s'épanouir dans les mondes émergents. Elle niche dans un nuage moléculaire (la Nébuleuse d'Orion) comme un filigrane de rosée dans une toile d'araignée.

Quatrième épisode. Fascinée par ce qu'il pourrait advenir de l'Anthropos alors qu'il émerge dans un monde qui lui est propre, l'Eon Sophia s'absorbe dans le rêve, le processus cosmique d'émanation. Mais elle le fait par elle-même, unilatéralement, sans sa contrepartie, en divergence de la loi cosmique de polarité grâce à laquelle l'équilibre et l'harmonie sont maintenus dans la myriade des mondes. Captivée par les potentialités de la singularité humaine, l'Anthropos, elle dérive du Plérome, s'éloigne du centre cosmique et plonge dans le royaume du chaos externe et tourbillonnant en dehors du coeur galactique.

Cinquième épisode. Le plongeon de Sophia en dehors de la Divinité suprême produit un impact imprévu dans le royaume du chaos, engendrant une espèce d'êtres inorganiques, les Archontes. Dans sa fascination avec l'Anthropos (l'espèce humaine) et dans ses prévisions d'évolutions futures, la Déesse n'a pas anticipé l'émergence de ces entités étranges. Elles constituent un facteur anormal ou déviant qui pourrait enrayer l'évolution humaine.

Les Archontes se rassemblent autour d'une déité centrale, le Démiurge, qui croit à tort qu'il est le créateur de tout ce qu'il contemple. Le dieu dément se met à construire pour lui-même un habitat céleste à partir de la matière atomique: c'est le système planétaire à l'exclusion de la Terre, du Soleil et de la Lune.

Sixième épisode. Alors que la structure du système planétaire se met en place, une étoile nouvelle-née émerge de la nébuleuse dans laquelle l'Anthropos est lové. Due à sa masse supérieure, l'étoile entraine le système planétaire émergent à se rassembler autour d'elle. Elle devient le soleil central du ciel archontique, un royaume de mécaniques célestes dominées par des forces inorganiques et aveugles. Sophia ridiculise le Démiurge en lui déclarant que l'Anthropos, bien qu'il ne soit pas encore né, surpasse les Archontes en intelligence, car l'humanité est une émanation du Plérome, tandis que les Archontes émergèrent en dehors du coeur cosmique, sans nul acte d'émanation. Témoin de cette réprimande et choquée par l'arrogance du Démiurge, l'étoile nouvelle-née expérimente une conversion: elle choisit de faire front avec Sophia contre le royaume des forces Archontiques, c'est à dire le champ planétaire inorganique. La Déesse Déchue prend acte de ce choix et génère, d'elle-même, une fille à son image, la force de vie Zoé, qui s'unit avec le Soleil, l'étoile mère du système planétaire.

Septième épisode. Sophia se métamorphose en une forme terrestre, devenant elle-même une planète, mais une planète organique, consciente et sensible: la Terre. Mais la Terre est ensuite capturée dans le système inorganique du Démiurge, la sphère des mécaniques célestes.

Huitième épisode. Les émotions éprouvées par Sophia de peur, de chagrin et de confusion se transmutent dans les éléments physiques de la Terre et de la biosphère. Le globe terrestre se solidifie et la vie émerge en formes foisonnantes mais Sophia est incapable de maîtriser sa progéniture. Les dieux dans le Plérome prennent conscience de sa difficulté et ensemble envoient l'Eon Christos afin d'intercéder et d'apporter de l'ordre à la diversité biologique du monde de Sophia. Après avoir réalisé cette intercession, Christos laisse une sorte d'image rémanente rayonnante dans la biosphère, quitte ensuite la Terre et retourne vers le Plérome.

Neuvième épisode. En identification totale avec les processus de vie de la planète qu'elle est devenue, Sophia s'éveille au monde de son rêve solitaire, le monde dans lequel une souche particulière de l'humanité émerge à partir de l'archétype maître de l'Anthropos et s'engage à vivre une expérimentation divine: l'épanouissement d'une innovation humaine.

Mais avec l'innovation vient le risque de déviation. Sophia elle-même semble avoir dévié de l'ordre cosmique de par son empêtrement dans le royaume planétaire, du à son acte indépendant et passionné de rêve. D'une façon mystérieuse, sa “correction” (sa réorientation vers le centre cosmique) peut dépendre du triple défi auquel l'humanité doive faire face: découvrir sa niche évolutive, rester en harmonie avec son cours propre d'évolution, et définir son rôle dans les finalités transhumaines de Gaïa.

L'histoire de Sophia est en cours. Sa conclusion ne peut être décrite sans que l'histoire sacrée soit imaginée et vécue. Au contraire de l'histoire sacrée de la tradition Judéo-Chrétienne-Islamique, le mythos ne se termine pas avec un événement catastrophique à un moment particulier du temps linéaire et historique. Le scénario de co-évolution ne contient pas de confrontation ultime entre le Bien et le Mal. Son aboutissement n'est pas fixé par le destin ou déterminé par avance par une puissance surnaturelle. Bien plutôt, l'histoire de la Déesse Déchue est le cadre ouvert pour l'implication atemporelle dans les finalités transhumaines de Gaïa. Il ne dénie ni ne dévalue les finalités humaines tant qu'elles sont imaginées en accord avec le complexe vital englobant de la biosphère. Notre survie dépend d'une “adaptation créative” à Son Histoire (jeu de mot intraduisible en Français entre History et Herstory). La loi de Gaïa n'est pas la survie des plus adaptés mais la survie de ce qui est adapté à Ses finalités, de ce qui est en résonnance avec Son Rêve.

La survie de ce qui Lui plaît, pour ainsi dire.

Enseignements de Visions

Les femmes et les hommes de l'ancien temps, qui apprirent et enseignèrent l'histoire sacrée de Sophia, considéraient que son aboutissement dépendait, sans en être totalement déterminé, de la relation entre la déesse de sagesse et l'humanité. Dans un sens, Sophia est le sauveur de l'humanité, parce qu'elle confère à l'espèce humaine un pouvoir spécial, l'epinoia, grâce auquel elle puisse accomplir son rôle unique dans les processus de vie de la déesse. Epinoia est l'imagination. C'est la faculté dont nous avons besoin pour nous engager consciemment dans la “correction” de Sophia, le processus de son réalignement avec la source cosmique dont elle s'est éloignée en se projetant, dans le monde humain émergent, prématurément et sans un consort, sans une contrepartie cosmique. En d'autres mots, Gaïa-Sophia dépend de l'humanité pour revendiquer et développer son potentiel intrinsèque afin qu'elle puisse accomplir son désir divin: rêver le monde humain en relation intime avec ceux qui y demeurent.

La Déesse rêva l'humanité à partir de la plénitude cosmique, le Plérome, et elle plongea du coeur cosmique, se transformant en le monde même où nous pourrions devenir ce qu'elle imagine. En raison de sa présence dans ce monde, la divinité peut fleurir dans les spores humains, le pollen de la Divinité florissante. Le futur humain optimal est en train de rêver Sophia.

Il est vrai que nous ne sommes pas l'unique espèce dans la biosphère et encore moins l'espèce supérieure ou suprême. Toutes les autres espèces sont également intimement impliquées avec Gaïa, mais selon des voies assez différentes parce que l'humanité est profondément et spécifiquement impliquée à la fois dans l'attraction primordiale, qui impulsa le plongeon de Sophia hors du Plérome, et dans l'aberration qui en résulta. Selon cette histoire, des mesures cosmiques sont en cours afin d'accompagner Sophia dans la structuration de son monde et afin de pallier au risque d'aberration posé par les Archontes. L'Apocryphe de Jean décrit, de manière très détaillée, l'acte spécifique de l'intervention Pléromique (épisode 7) et la réaction de Sophia:

“Avec l'assentiment de l'esprit invisible de l'Originateur, la force divine se déversa sur elle à partir de tout le Plérome des Générateurs, les Eons divins. Car ce ne fut pas son consort qui vint seulement à sa rescousse mais, au travers du Christos, l'entièreté du Plérome afin qu'elle pût corriger son insuffisance. Et elle fut élevée au-dessus du royaume de sa progéniture, le Seigneur des Archontes, afin qu'elle pût séjourner dans le neuvième jusqu'à ce qu'elle ait eu corrigé son insuffisance”.

Dans le langage des Mystères, le Neuvième est le terme codé pour la Terre en tant que corps planétaire organique distinct du système planétaire inorganique, appelé le Septième ou l'Hebdomade. Dans de nombreuses mythologies, de par le monde, neuf est le nombre de la Déesse. Trois fois trois est la signature prééminente de la divinité féminine. Selon Graves, “la Triple Muse est la femme dans sa nature divine: l'enchanteresse du poète, le seul sujet de ses chansons”.

D'un point de vue cosmologique, le Huitième est la sphère des étoiles fixes, le Zodiaque. L'Apocalypse d'Adam (CNH, V, 5) contient un long passage décrivant treize constellations dans lesquelles l'Illuminateur (phoster) “surgira en grande gloire... déposant les fruits vivants de la gnose.” Le texte déclare que “ceux qui méditent sur la connaissance de l'Un Eternel dans leurs coeurs” recevront l'illumination spirituelle directement des sphères zodiacales. Il se peut fort bien que cela ait été la sphère vers laquelle les initiés Gnostiques tournaient leur regard afin de décrypter le scénario visionnaire complexe du mythos de Sophia.

Une partie du travail des telestai consistait à écrire et à discourir abondamment mais ils réservaient également une partie de leur enseignement à la transmission strictement orale: “Car ils seront reconnus jusque dans la sphère cosmique des Eons parce que les paroles, dont ils étaient les gardiens, au sujet de l'Originateur des Eons, n'étaient ni consignées dans un ouvrage ni écrites” (Apocalypse d'Adam, 85:5). Les textes des Codex de Nag Hammadi font allusion à une instruction spéciale préservée pour “la transmission par entremise mentale” à l'image des termas ou trésors de sagesse du Bouddhisme Nyingma. Un type de terma Gnostique, comparable au “Terma de la Terre” Bouddhiste, et rédigé en écriture symbolique sur des parchemins, a survécu dans le texte (non Hag Hammadi) intitulé Deux Livres de Jeu (dans le Codex Bruce). La tradition Tibétaine de découvrir des termas cachés dans les rochers est évoquée dans le texte Gnostique: “Car ils [ces enseignements] seront sur une haute montagne, sur un rocher de vérité”. (Apocalypse d'Adam, 85:10). Un autre parallèle se trouve dans Allogènes (CNH, XI, 3: 68.5-25) dans lequel le mystes est instruit de “rédiger les choses que je vais te dire et que je veux te rappeler pour le bénéfice de ceux qui en sont dignes et qui viendront après toi. Et tu laisseras ce livre sur une montagne et tu invoqueras le gardien 'viens, Terrible'”. Cela rappelle la tradition Nyingma d'ouvrages cachés et gardés par de féroces démons jusqu'à ce que la bonne personne arrive pour les découvrir.

L'érudit Bouddhiste Tulku Thondup souligne qu'un type de terma appelé “les enseignements de la Vision Pure” n'est pas l'apanage des Nyingma, ce qui ouvre la possibilité de tels phénomènes à l'extérieur de la tradition Tibétaine. La compagnie du Huitième, qui est également un terme codé pour le noyau intérieur de la cellule des Mystères, aurait été particulièrement disposée à lire et à cacher certains enseignements dans la sphère zodiacale. Les termas se caractérisent par une faculté d'émerger dans le temps: ils restent dissimulés jusqu'au moment approprié, des siècles plus tard, pour leur découverte. Pour les telestai, le royaume du zodiaque étoilé était un tableau cosmique constitué d'immenses images cosmiques, les constellations, chacune correspondant à un âge du monde. Non seulement pouvaient-ils lire les leçons prévalentes durant chaque âge, englobant de vastes périodes de temps, que l'humanité devait apprendre, mais encore possédaient-ils des méthodes pour décoder l'écriture symbolique du zodiaque. Ils percevaient, en chacune des treize constellations, un langage codé qui consigne le potentiel humain, de la même façon que le langage génétique consigne - et écrit - la pleine potentialité de la vie organique.

Une telle faculté de lecture de la nature, au niveau cosmique, est caractéristique des cultures shamaniques dans lesquelles l'observation des étoiles et la divination étaient des pratiques communes. La religion indigène pré-Bouddhiste du Tibet, Bön Po, était une ancienne forme de shamanisme dont les adeptes s'étaient spécialisés dans l'observation céleste et dans la divination astrale. La sagesse indigène des étoiles des Bön fut traduite en techniques secrètes afin de guider le “principe de conscience” après la mort pour que nous puissions nous incarner par nous-mêmes. C'est l'origine de la continuité des lamas, qui se réincarnent, et qui persiste de nos jours dans le Bouddhisme Tibétain. Il est plus que probable que les adeptes des Mystères pouvaient de même choisir et diriger leur propre incarnation, guidée par les schémas à long terme qu'ils lisaient dans le zodiaque.

La présence abondante de sites sacrés et de mégalithes dans toute l'Europe, qui sont orientés astronomiquement, prouve au-delà de tout doute que le shamanisme indigène Européen était également orienté vers les étoiles. Dans les Antiquités Juives (1: 68-72), l'historien Josephus affirma que les Fils de Seth étaient considérés par les anciens Hébreux comme des voyants célestes qui “découvraient les sciences des corps célestes et leurs cycles”. Cette sagesse était reconnue émaner des époques antédiluviennes, avant le Déluge, et préservée sur deux tablettes ou piliers érigés dans le site mythologique appelé Seiris. La Montagne de Seir était un site sacré pour les Enfants de Seth, ainsi que certains Gnostiques se nommaient eux-mêmes. Jacques Lacarrière considère également la science des étoiles comme la matrice originelle du système de connaissance des écoles Gnostiques. Une telle connaissance est sûrement la source de la perspective cosmique cinématique que nous rencontrons dans le mythos de Sophia.

Le Zodiaque de Dendera

Sur la rive occidentale du Nil, à un jet de pierre de Nag Hammadi, se trouve Dendera, le site d'un temple Ptolémaïque magnifique dédié à Hathor, l'Eve Egyptienne. Un bas-relief, situé sur le plafond d'une petite chapelle, préserve le seul zodiaque intact ayant survécu de l'antiquité. Les axes dans l'infrastructure du modèle prouvent que ses concepteurs avaient une parfaite connaissance du cycle entier de 26 000 années de précession zodiacale. La proximité de ce trésor astronomique avec les grottes de Nag Hammadi a été négligée par les érudits; cependant, il est plus que probable que les Codex Egyptiens venaient de la bibliothèque officielle du temple de Dendera, ou de ce qui en restait. Juste en face de Dendera, de l'autre côté du fleuve, se trouvent les ruines d'un antique monastère Copte, Tabennisi. A l'époque où les Codex furent cachés dans une grotte, aux environs de 345 EC, le fondateur du monastère, le moine cénobite Pachomius, venait juste de mourir. Une génération plus tard, le monastère tomba sous le contrôle de Shenoute d'Athribis (348-466), le chef de file de l'église Chrétienne Copte et un proche allié de Cyrille d'Alexandrie, l'homme qui orchestra probablement le meurtre d'Hypatia. A son grand désarroi, Shenoute s'aperçut qu'un petit groupe de Gnostiques persécutés avaient trouvé refuge dans le Temple d'Hathor. Il écrivit à Cyrille que les hérétiques possédaient des “livres remplis d'abominations” qui devaient être assurément détruits. Shenoute ordonna aux Gnostiques de renoncer à leurs croyances perverties et d'accepter Cyrille comme leur maître spirituel. Lorsque les Gnostiques résistèrent, Shenoute les avertit dans un langage très clair: “Je vous ferai reconnaître l'archevêque Cyrille sinon la plupart d'entre vous périront par l'épée et ceux qui survivront seront envoyés en exil”. S'il se trouve encore des lecteurs qui se demandent ce qu'il advint des milliers d'enseignants et d'étudiants des Ecoles des Mystères de l'antiquité, voilà la réponse en une simple ligne. Cyrille répliqua par une approbation sans failles de l'impératif génocidaire en soulignant combien il démontre l'efficacité de la Foi Une et Véridique:

“La plupart de ceux qui pratiquaient la magie rassemblèrent leurs ouvrages et les brûlèrent publiquement et lorsque la valeur totale en fut calculée, elle en vint à cinquante mille pièce d'argent. C'est par ces voies que la parole du Seigneur a fait preuve de sa puissance, en se répandant de plus en plus largement et efficacement”.

Ces lignes furent écrites à environ quatre-vingt kilomètres de l'endroit dans lequel les Codex de Nag Hammadi furent dissimulés. Celui qui les cacha le fit sous l'ombre menaçante de Shenoute qui “rêvait de libérer le monde des pouvoirs démoniaques en débusquant les idoles à détruire dans les temples et les maisons privées”. Le “comportement violent et destructeur” de cet abbé Egyptien fut suivi par les gens qu'ils avaient sous son contrôle au Monastère Blanc, à savoir jusqu'à deux milles moines et mille huit cent moinesses. Ceux qui pratiquaient le mode de vie cénobite se devaient également d'exterminer la tradition Gnostique, d'en éradiquer les racines et les branches. Un historien décrivit les moines de Shenoute comme les “troupes de choc” du nouveau mouvement Chrétien dans cette antique place forte des Mystères, l'Egypte.

Les adeptes convaincus des Mystères à Dendera étaient certainement conscients que leur héritage sacré d'enseignements allait être annihilé. Mais ils devaient savoir, en même temps, que le temple étoilé, dans lequel ils avaient établi leur dernière position, allait perdurer. Il serait le témoignage de leur sagesse astronomique sans âge et de leur foi en une transmission, de type terma, par le recours au code cosmique, le zodiaque.