RechercAccueil - Contact
Chercher sur Liberterre
GaiaSophia Agriculture
Métahistoire Enthéogènes

Agriculture

Désertification

•> Planète Terre, Planète Désert?

ActualiTerres ReporTerres
LiberTerres Gaïagnostic
LivreTerres Boutique


Planète Terre, Planète Désert?

Dominique Guillet

Voir page 2

Les Vers de Terre

Sur la planète Dune, les grands vers sont les Seigneurs des déserts. Ils sont la source unique de l’Epice, le Mélange de longévité. Grâce à sa fournaise interne de digestion, un grand ver de 200 mètres peut générer dans l’atmosphère autant d’oxygène qu’une surface couverte de végétation sur dix kilomètres carrés.

Sur la planète Terre, les petits vers sont les Seigneurs des Anneaux! Ils sont l’intestin et le grand recycleur de notre planète et Darwin passa les dernières années de sa vie à les étudier. Il en existe plus de 3600 espèces répertoriées au monde (dont 350 espèces en Europe). Cependant, il est estimé que le nombre réel d’espèces peut atteindre 7000 ou même 10 000. Ils peuvent vivre jusqu’à 15 ans.

Les quelques espèces géantes (de 60 cm à 1 mètre de longueur) qui existaient en Oregon aux USA, Driloreirus americanus et Driloreirus macelfreshi, ont totalement disparu. Ces grands vers blancs exsudaient une substance au parfum de lys. Une espèce de ver géant subsiste encore en Australie. Megascolides australis peut atteindre 1 mètre de longueur et 3 mètres de longueur en s’étirant.

Les vers de terre peuvent abonder dans des terres fertiles et saines. Une prairie permanente non traitée peut en compter de 150 à 400 par mètre carré, à savoir d’1,5 à 4 millions d’individus par hectare, ce qui représente une masse d’1 à 3 tonnes de vers par hectare.

En comparaison, un vignoble ou un champ de céréales maltraités par l’agriculture industrielle et toxique n’en contient que d’un à trois individus par mètre carré. A savoir 130 fois moins.

Les vers de terre sont la clé de la fertilité des sols. Ils sont de trois types:

- Les Epigés (les plus petits, de 1 à 5 cm de longueur) travaillent en surface à digérer le couvert végétal.

- Les Endogés (les vers de taille moyenne, de 1 à 20 cm de longueur) sont sous terre et se nourrissent de matière organique déjà décomposée. Ils peuvent creuser jusqu’à 500 mètres de galeries par mètre carré. Ils représentent 20 à 50% de la biomasse des terres fertiles.

- Les anécique (les plus grands vers qui font de 10 cm à 1 mètre de longueur) vivent dans le sous-sol et peuvent creuser des galeries verticales de trois mètres de profondeur. En Europe tempérée, ils représentent 80 % de la masse totale des vers de terre.

Les vers de terre sont de grands laboureurs: ils enfouissent dans les couches profondes du sol les éléments organiques qu’ils ont prélevés et fragmentés en surface et remontent à la surface la terre des couches profondes ingérée en même temps que les matières organiques.

Les vers de terre sont de grands aérateurs: ils peuvent creuser jusqu’à 5000 km de galeries par hectare, ce qui représente une surface de contact équivalente à 5 hectares.

Les vers de terre sont de grands percolateurs: toutes les eaux de pluie, y compris de violentes pluies d’orages, (jusqu’à 160 mm d’eau par heure) peuvent être absorbées par le sol grâce à ce même travail d’élaboration de galeries.

Les vers de terre sont de grands digesteurs: une biomasse moyenne de vers de terre (environ une tonne par hectare) ingère, en une année, 400 tonnes par hectare de terre et de matière organique (jusqu’à 1 000 tonnes dans les zones tropicales).

Les vers de terre sont, ainsi, de grands régulateurs biologiques du sol, grâce à leur grande capacité d’interaction avec les micro-organismes. Ils produisent du mucus (qui est un substrat organique très énergétique) qu’ils mélangent dans leur tube digestif avec le sol ingéré (qui contient des particules minérales, organiques, et de la microflore) et de l’eau. Leur système digestif mutualiste crée ainsi un milieu idéal pour les bactéries dormantes dans le sol ingéré: elles réactivent leurs capacités enzymatiques et digèrent la matière organique. Leurs déjections constituent ensuite des complexes organominéraux stables. Certaines espèces de vers de terre produisent des phytohormones qui vont favoriser la croissance des plantes. Les vers de terre peuvent également annihiler l’effet négatif des nématodes phytoparasites sur le rendement des cultures


Les vers de terre, source par excellence de fertilité, ont “déserté” les terres agricoles qui sont devenues les poubelles toxiques de l’agro-industrie. Quel pourcentage de vers subsiste dans les terres agricoles françaises, par exemple? Le calcul est simple. Comme l’agriculture biologique ne représente que 2 % des surfaces et que les vers de terre ne survivent pas dans les terres massacrées par l’agro-chimie, ce sont donc 98 % des vers de terre qui ont disparu.

Cette agriculture intensive et industrielle les a détruits de quatre façons:

- par le labour: les lames de charrue les déchiquettent et le retournement du sol les exposent à de très nombreux prédateurs à la surface.

- par le passage d’engins agricoles excessivement lourds qui tassent et asphyxient les sols.
- par la faim: ils sont, en effet, affamés par le manque d’apport de matière organique.

- par tous les poisons répandus par les multinationales biocidaires: pesticides et intrants de synthèse.

Les vers de terre sont d’ailleurs de puissants concentrateurs de poisons. Ils peuvent concentrer le plomb à des teneurs de plusieurs dizaines de fois supérieures à celles du sol et le DDT à des teneurs 150 fois supérieures à celles du sol.

Peut-être les grands mafieux de l’agro-chimie sont-ils en train de concocter, dans leurs laboratoires secrets, des vers de terre transgéniques résistants au DDT, à l’atrazine, au glyphosate, à l’endosulphon, etc? Des petits vers de terre chimériques pour l’agriculture durable à la sauce Monsanto?

Tsunamis alimentaires

Au risque de nous répéter, répétons-le cependant: tous les jours, 36 000 personnes meurent de faim, dont 2/3 sont des enfants. Mourir de faim signifie ne pas avoir assez à manger. Comme le dirait un célèbre présidentiable, ces enfants sont peut-être programmés génétiquement pour mourir de faim? La mort par faim est-elle une erreur du programme génétique de l’humanité?

On trouve encore dans des livres d’école des commentaires moralisateurs sur la décadence de la civilisation Aztèque qui sacrifiait quelques victimes sur ses autels de pierre.

La mort quotidienne de faim de 36 000 personnes n’est-elle pas un grand sacrifice collectif mis en place par la société décadente des riches et toléré par les institutions internationales?

Le directeur de la FAO, Jacques Diouf, avait même un jour confié que son organisation pourrait solutionner la moitié du problème de la faim et de la malnutrition dans le monde avec seulement l’équivalent de deux semaines de dépenses militaires US, à savoir une petite vingtaine de milliards de dollars.

Donc, nous allons évoquer maintenant les surfaces arables disponibles pour la production de nourriture, mais sans illusion.

Les dés sont pipés: il n’y a aucune volonté de solutionner ce problème planétaire et on serait même enclin à penser qu’il y aurait plutôt une volonté affirmée de vider quelques continents de leur humanité. Après tout, l’Afrique est immensément riche dans son sous-sol: du zinc, de l’uranium, du pétrole, des diamants, du nickel ... Et pour l’extraction, les machines conviennent parfaitement.

Selon la FAO, la surface moyenne de terre arable par habitant était de 0,32 hectare en 1961/1963 (pour une population mondiale de 3,2 milliards), de 0,21 hectare en 1997/1999 (pour une population mondiale de 6 milliards) et sera de 0,16 hectare en 2030 (pour une population mondiale estimée à 8,3 milliards).

Selon certains experts indépendants, les projections ci-dessus sont hautement optimistes car la surface moyenne de terre arable par habitant dans les pays pauvres sera seulement de 0,09 hectare en 2014. Elle n’était déjà que de 0,08 hectare en 1996 en Chine.

Quel est l’état de la production de grains à l’échelle planétaire? Un mauvais état.

L’an passé, l’Australie n’a produit que 10 millions de tonnes de blé au lieu des 21 millions escomptées. En 2007, la situation s’empire pour ce pays. Le premier ministre Australien John Howard, qui ne croit pas au réchauffement climatique, a déclaré en fin avril que les agriculteurs du bassin Murray-Darling seraient privés d’eau d’irrigation s’il ne pleut pas en mai. Ce bassin concentre normalement 70 % des ressources en eau d’irrigation du pays et il produit 40 % de la nourriture pour l’Australie. Au printemps 2007, le flux d’eau de ce bassin est seulement le quart de la plus mauvaise année enregistrée.

En Chine, ces dernières années, la production de blé est tombée en-dessous de 100 millions de tonnes alors qu’elle avait été de 127 millions de tonnes en 1997. Cette baisse est imputable à la pénurie en eau.

En fait, les pays grands producteurs de grains, les USA, la Chine, l’Inde, l’Australie, la France sont confrontés à de graves pénuries d’eau. Dans le sud-ouest de la France, des agriculteurs abandonnent la culture du maïs irrigué.

Au niveau mondial, les stocks sont au plus bas depuis 35 années. Ils étaient de 57 jours à fin 2006. Les cours des denrées alimentaires flambent. Aux USA, 115 % d’augmentation pour le maïs en 15 mois.

Soyons réalistes, la Planète Terre continuera bien à nourrir une petite partie (de plus en plus restreinte) de la population humaine jusqu'en l'an 2050. Après quoi, rideau: changement de décor. Et c'est un scénario optimiste (quant à l'échéance dans le temps) car il ne prend en compte ni l'accroissement de la population mondiale, ni la montée des niveaux des océans, ni les bouleversements climatiques que tout un chacun peut commencer à observer, ni bien sûr un emballement climatique que personne n'ose imaginer.

Ce scénario “optimiste” ne prend pas en compte non plus, bien sûr, la grande supercherie des agro-carburants que nous venons de dénoncer dans notre article “Mettez du sang dans votre moteur: la tragédie des nécro-carburants”.

Ces agro-carburants vont générer une accélération de la déforestation: l’Indonésie, par exemple, envisage de détruire 16 millions d’hectares de forêts pour les remplacer par du palmier à huile (bientôt transgénique). Une telle monoculture constitue la première phase du processus de désertification car un sol tropical découvert devient à très court terme un désert. L’Indonésie détient d’ailleurs le record du monde de la déforestation avec 1,8 millions d’hectares par an, ou 205 hectares par heure.

Selon des scénarios résolument pessimistes, ou tout simplement, en fait, réalistes, de grandes crises alimentaires vont se profiler dès l’année prochaine et peut-être même dès cette année. Les températures ne cessent de grimper: certains agronomes estiment qu’une augmentation d’un degré celsius peut provoquer une baisse de rendement de 10 % dans les céréales.

Toutes les anciennes variétés agricoles, qui se caractérisaient par une très grande résilience, ont été éradiquées par les multinationales de l’agro-chimie et de l’agro-alimentaire et leurs complices dans les appareils d’état. Sauve qui peut les anciennes variétés!!

Le Titanic agricole est en train de sombrer et c'est un tsunami alimentaire qu'il va provoquer. L’an prochain ou peut-être demain.

Le monothéisme: une erreur de programme génétique?

Une civilisation qui détruit ses semences, qui détruit ses sols, qui détruit ses eaux, qui détruit ses enfants, c’est une civilisation en train de mourir. La civilisation occidentale est moribonde. Va-t-elle entraîner le reste de l’humanité et tous les écosystèmes dans son sillage?

Dans le passé de l’humanité, de nombreuses civilisations ont émergé et puis disparu, parfois à la suite de la désertification de leurs terres. Ce qui caractérise notre civilisation occidentale, cependant, c’est sa capacité à détruire tout ce qu’elle touche. Elle génère un désert d’amplitude planétaire.

Il est fort intéressant de percevoir que les trois religions monothéistes sont nées du désert.

Depuis 2000 ans, le monothéisme a généré, en de nombreuses contrées, un désert culturel: hors du monothéisme, point de salut. Il n’est pas dans notre propos, ici, de débattre des différences entre ces trois courants monothéistes et de débattre de leur participation respective aux fondements de la société occidentale et de leur responsabilité respective dans l’aggravation du cauchemar écologique que nous infligeons présentement à la sphère planétaire.

Nous souhaitons juste souligner que la société occidentale est née du désert et qu’elle retourne aujourd’hui au désert pour mourir. Malheureusement, elle ne retourne pas au désert, berceau de ses origines: c’est toute la Planète Terre qu’elle transforme inexorablement en un désert mortuaire.

Pour les fondateurs de la société occidentale, le désert n’était pas valorisé en tant qu’écosystème. C’était juste un vide, l’idéalisation d’un état de désengagement, d’aliénation, un symbole de la nature de l’esprit humain. C’est la société occidentale qui a inventé l’histoire écrite avec tous ses avatars d’évolution, de temps linéaire, de progrès, de croissance. C’est la société occidentale qui a sombré dans la folie de la croissance illimitée sur une planète finie, sur une planète limitée. Sans doute parce que ses racines sont empreintes justement d’aliénation, dans le sens d’une coupure totale d’avec le milieu ambiant, dans le sens d’un irrespect total de la Nature, dans le sens d’un abandon total des connections avec le Cosmos. Désert, desertus, deserere, abandonner.

Peut-on dire avec David Miller que le monothéisme engendre d’un point de vue social le fascisme, l’impérialisme, le capitalisme; engendre d’un point de vue philosophique la dualité, la dichotomie et la non-diversité; engendre d’un point de vue psychologique des conceptions rigides, linéaires et figées? Et nous pourrions peut-être ajouter que le monothéisme engendre d’un point de vue agricole la monoculture, la monoalimentation, la destruction de la diversité biologique. En fait, le monothéisme ne serait-il pas la négation même de la Vie?
La relation entre le monothéisme et le désert reste un sujet fascinant à explorer. Car le désert a aussi engendré de magnifiques civilisations, tels les Chacos dans le sud-ouest des USA, qui n’ont pas sombré dans l’impérialisme. Les Aborigènes ont survécu dans le désert Australien pendant 40 000 années et ont été détruits en peu d’années par les colons blancs qui ont détruit également tous les écosystèmes.

Peut-être la mission de l’humanité future et survivante sera-t-elle de réapprivoiser le désert?

Dominique Guillet. Le 3 mai 2007.